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  • : Marie-Odile et Philippe
  • : Ce blog a pour ambition de décrire nos balades à travers la Planète, nos vacances snorkeling, mais aussi et surtout, la vie en Guyane (petites histoires, monuments, faune et flore) ...
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Météo en Guyane

16 novembre 2023 4 16 /11 /novembre /2023 07:26

Après avoir déjà rédigé sur ce blog de Marie-Odile et Philippe quelques articles sur des artistes peintres bagnards en Guyane tels que Louis Grilly, Valentin Pourcillot, Casimir Prenefato ou encore Pierre Huguet, je vous présente aujourd'hui un autre peintre de talent qui fut lui aussi condamné à finir ses jours dans la colonie pénitentiaire de Guyane.

Daniel Capbal est né le 4 décembre 1861 à Bordeaux (Gironde) au domicile de ses parents au numéro 1 de la rue Crouzillac. Son père Jean-Pierre était peintre en bâtiment, il s'était marié dans cette même ville de Bordeaux le 28 octobre 1845 avec Adèle Marie Tudal qui  exerçait le métier de lingère. Les parents de Daniel auront au total douze enfants.

Daniel Capbal grandit à Bordeaux jusqu'à son engagement volontaire dans l'armée pour une durée de cinq ans à la mairie de cette même ville le 26 octobre 1880 et rejoint le 24e Régiment d'artillerie à Tarbes. Lorsqu'il s'engage, il déclare être employé de commerce et habiter 28 rue Méry à Bordeaux.

Sa fiche matricule militaire précise qu'il mesure 1m72 , qu'il a les cheveux châtains, le front découvert et fuyant, les yeux marrons, le nez long, le visage ovale et le menton rond. Il y est surtout indiqué que D. Capbal a de très nombreux tatouages sur le corps : une tête de mort ayant une pipe à la bouche, deux tibias en croix, ainsi que les mots écrits "Haine, mort, vengeance", une main tenant un poignard qui lui traverse le téton gauche, une femme assise sur sa poitrine, une ancre sur la main droite, un buste de femme sur le bras gauche.

Paysage de la Guyane signé D. Capbal et daté de 1930 (france-estimations.fr))

Paysage de la Guyane signé D. Capbal et daté de 1930 (france-estimations.fr))

Le 17 juin 1882, il est muté à la 3e Compagnie de fusiliers de discipline à Tiaret en Algérie. Ces compagnies de discipline étaient réservées aux militaires ayant commis des délits, ou étant insoumis, déserteurs ou qui ne respectaient pas le règlement militaire. Ces "disciplinaires" étaient considérés dans un état permanent de punition. Cependant les militaires des compagnies de fusiliers de discipline étaient susceptibles, en raison de leur éventuel bon comportement, de réintégrer leur régiment d'origine.

Le 21 août 1883, D. Capbal est transféré dans cette même 3e Compagnie à la section des pionniers de discipline. Cette section était encore plus dure au niveau discipline que la section des fusiliers. En d'autres termes, il semble que Capbal ait aggravé son cas au niveau comportemental. On y mettait les militaires les plus indisciplinés, presque incurables. Il est du reste condamné le 6 octobre 1884 par le Conseil de guerre permanent de la Division de Constantine à un mois de prison et 50 francs d'amende pour s'être rendu coupable d'un bris de clôture.

Ces compagnies de discipline (fusiliers ou pionniers) étaient appelées "Biribi", terme officieux qui désignait les établissements pénitentiaires en Afrique du nord, destinés aux militaires réfractaires ou indisciplinés de l'armée française.

Il récidive car il est à nouveau condamné le 31 août 1885 toujours par ce Conseil de guerre à un an de prison pour usurpation d'effets militaires de l'hôpital, effets qu'on lui avait remis pour le service. A l'issue de sa peine, il est intégré à la 4e Compagnie de fusiliers de discipline le 24 septembre 1886 pour être finalement mis dans la réserve de l'armée d'active le 25 novembre 1886.

Paysage du fleuve Maroni en Guyane par Daniel Capbal (Muceum / peinture sur tôle)

Paysage du fleuve Maroni en Guyane par Daniel Capbal (Muceum / peinture sur tôle)

Après deux périodes d'exercices militaires d'un mois chacun au 1er Régiment des zouaves en 1888 et 1889, Daniel Capbal qui s'est installé à Alger va multiplier les incivilités et autres délits. Ainsi la dépêche algérienne relate dans son journal du 9 octobre 1891 que D. Capbal sera condamné par la police correctionnelle à  un mois d'emprisonnement pour avoir dévalisé, avec d'autres complices, les baigneurs aux Bains Nelson à Alger, en leur volant dans les poches de leurs vêtements des objets de valeur.

Ce même journal daté d'octobre 1892 relate l'arrestation de Capbal et d'un complice, tous deux repris de justice, inculpés de vol d'un paletot de flanelle ainsi que la somme de 27 francs. Capbal déclare alors être artiste peintre et habiter 1 rue du Diable à Alger.

Mais ce n'est que le 29 juin 1899 que la Cour d'appel d'Alger condamnera Daniel Capbal à deux ans de prison et à la relégation pour usurpation de fonctions et vol. La relégation, réservé aux multirécidivistes, obligeait le condamné à rester vivre, sans espoir de retour, sur la colonie pénitentiaire après avoir purgé sa peine principale de prison.

Cet arrêt de la Cour d'appel faisait suite à un jugement du tribunal correctionnel d'Alger de mai 1899 qui l'avait condamné à cette même peine pour usurpation de fonction et vol. En effet, accompagné de deux complices, Capbal s'était présenté comme inspecteur de police au domicile d'un vieux médecin algérien se livrant à une véritable perquisition. Ils lui avaient dérobé la somme de 50 Francs ainsi qu'une ceinture.  

Haut Maroni en Guyane peint par D. Capbal dans les années 1920 (poggiolo.over-blog.fr)

Haut Maroni en Guyane peint par D. Capbal dans les années 1920 (poggiolo.over-blog.fr)

Embarqué le 31 mai 1901 sur le bateau à vapeur "Calédonie", destiné aux transports des prisonniers vers les bagnes coloniaux, il arrivera à Saint Laurent du Maroni  en Guyane le 11 juin de la même année. Comme bagnard, il portera le numéro de matricule 6628 et purgera ses deux ans de prison. Egalement condamné à la relégation, il restera en Guyane jusqu'à la fin de sa vie.

En mars 1913, il est condamné par le tribunal correctionnel du Maroni à un an de prison pour vol. Par la suite, il sera successivement admis soit à la relégation collective soit à la relégation individuelle en raison de son comportement dans la colonie. Les relégués collectifs étaient internés dans un camp, nourris et logés et astreints au travail. Ils ne percevaient que les 2/3 de leur salaire.

Les relégués individuels disposaient de ressources personnelles et n'étaient astreints qu'à un appel par trimestre. L'administration leur octroyait un petit lopin de terre et une case. Ces relégués individuels étaient autorisés à vendre leur production de légumes. On peut s'imaginer que Daniel Capbal disposait, parfois, de quelques finances notamment lorsqu'il réussissait à vendre ses peintures. L'intéressé, comme les autres peintres bagnards, peignait sur des sacs de toile (sac de farine ou autre), sur de la tôle, mais aussi sur différents objets tels que des calebasses. Comme les autres, Il essayait de vendre, et vendait parfois ses peintures aux gardiens du bagne, aux gendarmes ainsi qu'à des habitants de la Guyane un peu aisés. Cela lui permettait d'améliorer quelque peu son ordinaire.

Daniel Capbal décèdera le 19 juillet 1942 à l'âge de 81 ans.

Calebasses peintes de D. Capbal représentant pour l'une, un paysage du fleuve Maroni et pour l'autre, le Phare de l'enfant perdu au large de Cayenne (Musée Ernest Cognacq sur l'Île de Ré).Calebasses peintes de D. Capbal représentant pour l'une, un paysage du fleuve Maroni et pour l'autre, le Phare de l'enfant perdu au large de Cayenne (Musée Ernest Cognacq sur l'Île de Ré).

Calebasses peintes de D. Capbal représentant pour l'une, un paysage du fleuve Maroni et pour l'autre, le Phare de l'enfant perdu au large de Cayenne (Musée Ernest Cognacq sur l'Île de Ré).

Sources :

Archives départementales de la Gironde (Etat-civil et Registres matricules)

Anom 

La dépêche algérienne d'octobre 1891 et 1892 

Muceum / Musée Ernest Cognacq

 Site Web sur Overblog de Poggiolo, commune de Corse du sud

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commentaires

A
Et tant de finesse....
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