Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Marie-Odile et Philippe
  • : Ce blog a pour ambition de décrire nos balades à travers la Planète, nos vacances snorkeling, mais aussi et surtout, la vie en Guyane (petites histoires, monuments, faune et flore) ...
  • Contact

Heure de Guyane

 

Recherche

Météo en Guyane

19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 15:11

Les vestiges de l'habitation Vidal sont situés au pied du Mont Mahury, entre le fleuve du même nom, la crique Fouillée et le canal Beauregard sur la commune de Remire-Montjoly. Il s'agit d'une ancienne habitation coloniale qui a compté jusqu'à 300 esclaves dans les années 1830 et qui avait une superficie de plus de 600 hectares dont 70 en polders. Elle fut durant la première moitié du XIXe siècle l'une des plantations les plus prospères de la colonie.

Aujourd'hui, l'on peut voir encore quelques traces comme le moulin à mulets, des grandes marmites à sucre en fonte, un puits situé à l'entrée du site. Les deux machines à vapeur utilisées pour le broyage des cannes à sucre n'étaient pas visibles, sans-doute ont-elles été à nouveau recouvertes par la végétation.

Le moulin à mulets est formé d'un octogone régulier en pierres de taille de 7 m de côté, et d'une hauteur de 2,50 m avec une épaisseur d'environ 3,30 m, qui entoure une cour circulaire de 12 m de diamètre. Une rampe de 30 mètres de long permettait aux animaux d'accéder au niveau circulaire des murs.

Il faut souligner que c'est sur cette habitation, rebaptisée Mondélice après son rachat par le nouveau propriétaire Jean Vidal, que fut introduite en 1822 en Guyane la première machine à vapeur, construite à Liverpool. Un peu plus tard, dans les années 1830-1832, son fils Vidal de Lingendes qui hérita de l'habitation sucrière en 1825, fit introduire une seconde machine à vapeur à piston, mais cette fois, d'origine américaine.

Cette habitation Vidal, ou Mondélice, qui n'a pas encore dévoilé tous ses secrets, est accessible depuis le rond-point Adélaïde Tablon (près du carrefour Market de Remire-Montjoly), en prenant la direction du lycée Léon Gontran Damas. Au niveau du stade Edmar Lamar, il faut se garer en haut du parking. Pour l'instant, il n'y a pas de panneau spécifique indiquant l'entrée du sentier mais celle-ci est facile à trouver ...

Le sentier de randonnée qui mène directement à l'habitation Vidal fait 4 km à l'aller et se fait à douce allure en moins d'une heure. Il a été récemment refait, et l'allée principale est large et bien entretenue. En effectuant la balade au milieu de cette forêt secondaire, on peut entendre et apercevoir, de bon matin, des singes à la cime des arbres, et aussi voir des papillons dans le sentier, et notamment quelques morphos ...

Cette promenade est vraiment agréable même s'il manque, pour l'instant, encore quelques panneaux documentaires sur la flore et la faune, de même que des explications sur cette habitation sucrière qui reste un témoignage important, et facilement accessible, de l'histoire de l'esclavage en Guyane.

Propriété de la commune de Remire-Montjoly, cette habitation coloniale est classée Monument Historique par arrêté du 12 avril 1999.

Moulin à mulets restauré, et entretenu.

Moulin à mulets restauré, et entretenu.

Les terres et l'habitation ont été achetées en 1800 par le négociant Jean Vidal à la famille Macaye :

Durant le recensement de 1737, on trouve une famille Macaye qui demeurait sur une habitation non loin des rives du Mahury dénommée Le Courbary. Cette famille était composée à cette date de Claude Macaye, alors âgé de 29 ans, Conseiller, de son épouse Marguerite Courant, 21 ans, et d'un enfant Claude âgé de deux ans.

Claude Macaye, né le 27 décembre 1708 à Remire, s'est marié le 24 août 1733 à Remire avec Marguerite Courant, née le 2 juillet 1713 également à Remire. Le couple eut plusieurs enfants : Claude (né le 6 novembre 1734 - ?), François (Baptisé le 1 avril 1738 - décédé le 5 février 1765), Michel Nicolas (né le 29 septembre 1745 - et décédé le 15 août 1770), et Gabriel Alexis qui sera le seul garçon à enterrer son père, les autres enfants étant morts très jeunes.

Sur l'acte de décès de Claude, mort le 29 août 1781 à Cayenne, il est précisé qu'il était Conseiller honoraire du Conseil Supérieur de Guyane et ancien Procureur général. Son épouse Marguerite était décédée quelques années auparavant, le 4 octobre 1776 à Cayenne à l'âge de 63 ans. Claude de Macaye, et sa descendance, furent anobli à sa demande, en mérite de ses longs et loyaux services, par lettres (de noblesse), enregistrées au Conseil supérieur de la colonie le 4 mars 1778.

Claude est décédé à l'âge de 73 ans d'une fièvre catarreuse, dans un relatif dénuement eu égard à son ancienne position sociale, et infirme. Il était en effet devenu aveugle en raison d'une cataracte quelques années avant sa mort.

L'un de ses fils, Gabriel Alexis de Macaye né le 26 avril 1754 à Remire, baptisé le 4 juin dans la chapelle de l'habitation Loyola, s'est marié le 26 novembre 1782 à Remire avec Marie Thérèse Elisabeth de KERCKOVE (1762-1783). Gabriel Alexis était avocat au Parlement, juge à la cour souveraine de Cayenne. Après le décès de son épouse le 20 août 1783, il se remariera avec Marie Germaine Fromentin, native de Mozet-sur-Louet en Maine et Loire. Celle-ci décédera à son tour à Cayenne le 26 mai 1788.

Gabriel Alexis de Macaye se remariera une troisième fois le 18 mai 1818 à La Rochelle (Charente-Maritime) avec Elisabeth Victoire Pétronille de Baye. Gabriel Alexis décédera le 30 mai 1838 l'âge de 84 ans à La Rochelle.

Au final, au moins trois générations de Macaye auront eu une carrière dans la haute magistrature de la colonie, car le père de Claude, Antoine Macaye était lui-même Conseiller au Conseil supérieur depuis juillet 1717 jusqu'à sa mort à Roura le 4 février 1730.

Large sentier de randonnée menant à l'habitation Vidal

Large sentier de randonnée menant à l'habitation Vidal

Eu égard à la situation géographique de l'habitation Le Courbary à Remire appartenant à Claude Macaye, on peut dès lors penser que c'est bien cette habitation que le négociant Jean Vidal a acheté à la famille Macaye en 1800, et qu'il a rebaptisée Mondélice. Jean Vidal, né dans le diocèse de Carcassonne (Languedoc) s'est marié à l'âge de 39 ans le 4 mai 1793 avec Marie-Anne Elisabeth de Lingendes, née à Cayenne le 24 avril 1762, fille de Jean-Jacques de Lingendes, écuyer, enseigne d'une compagnie de la marine à Cayenne, et de Jeanne Favre.

Marie-Anne Elisabeth de Lingendes s'était mariée une première fois le 17 février 1789 avec Marie Claude de Nompère, dit le chevalier de Champagny, lieutenant au régiment de cavalerie Royal Cravate, avec lequel elle eut un fils, Nicolas Charles Stanislas Louis Marie de Nompère, dit le comte de Champagny. Celui-ci est né à Cayenne le 6 septembre 1789. Marie Claude de Nompère décèdera à Cayenne le 12 décembre 1789 à l'âge de 30 ans, soit à peine 9 mois après son mariage.

Le couple Vidal n'aura qu'un seul enfant, un fils prénommé Jean François Marie Félix Stanislas qui naîtra le 6 novembre 1793 à Wilmington, province du Delaware (Nouvelle-Angleterre). En Guyane, Jean Vidal va développer son habitation pour la transformer en sucrerie en 1819 et en 1823, installera la première machine à vapeur de marque Smith.

Jean Vidal décédera le 13 janvier 1825 sur son habitation Mondélice, au quartier de l'Île de Cayenne. A cette date, son fils Vidal de Lingendes était avocat à la cour Royale de Paris depuis 1821. Il ne rentrera en Guyane que courant 1825 où il deviendra à partir d'avril 1826, Conseiller à la cour Royale de Cayenne. Dès le 7 juin 1826, il sera nommé Procureur du Roi auprès du Tribunal de 1ère Instance de Cayenne, puis Procureur Général le 28 décembre 1828.

Dès son retour en Guyane, Vidal de Lingendes reprend à son compte l'habitation Mondélice qu'il gardera jusqu'à sa vente en 1855 au Père Guyodo de la congrégation du Saint Esprit. Ce dernier avait comme projet d'ouvrir une école professionnelle et agricole. Quelques années après, un arrêté du gouverneur du 25 juin 1864 prescrit effectivement l'ouverture d'une école agricole sur l'habitation Mondélice. La maison de correction pour les jeunes détenus de Guyane sera annexée par ce même arrêté à cette école agricole.

L'habitation sucrière de Mondélice, comme pour toutes les propriétés esclavagistes des anciennes colonies, n'a pas survécu très longtemps à l'abolition de l'esclavage de 1848 qui a entraîné un départ massif de tous les nouveaux libres. De plus, la chute des cours du sucre obligera son propriétaire Vidal de Lingendes, quelques années avant la vente de la propriété, à diversifier sa production vers le café, le roucou et l'élevage.

Quant à Vidal de Lingendes, il aura assuré pendant huit mois le gouvernement de la colonie en 1851 à la suite du décès prématuré du gouverneur par intérim Eugène Maissin. Un an plus tard, en juin 1852, il quittera définitivement la Guyane pour s'installer à Paris. A sa demande, il sera mis à la retraite le 9 novembre 1853.

Jean-François Marie Felix Stanislas décèdera à Paris le 11 juillet 1857 à l'âge de 61 ans.

Au total, ce sont 25 marmites à sucre en fonte qui ont été trouvées à ce jour sur le site.

Au total, ce sont 25 marmites à sucre en fonte qui ont été trouvées à ce jour sur le site.

Pour la petite histoire, Jean-François Marie Félix Stanislas Vidal de Lingendes a dû rédiger une note devant être jointe au certificat d'individualité lié à sa nomination comme officier de la légion d'honneur en 1836. Dans cette note, il explique que lors de son arrivée dans la colonie pour la première fois en 1820, il y avait une autre personne qui avait le même patronyme.

Aussi, pour le distinguer, on ajouta à son nom celui de "de Lingendes", du nom de jeune fille de sa mère. Il écrivit alors un peu plus tard au ministère de la justice pour régulariser cette situation car son acte de naissance, comme par la suite ses diverses nominations officielles, ne le désignaient que sous le nom de Vidal.

Finalement, une ordonnance du 16 juillet 1840 l'autorisera officiellement à rajouter "de Lingendes" à son patronyme.

Autres photos des vestiges de l'habitation Mondélice :

Ancienne habitation sucrière Vidal ou Mondélice à Remire-Montjoly en GuyaneAncienne habitation sucrière Vidal ou Mondélice à Remire-Montjoly en Guyane
Ancienne habitation sucrière Vidal ou Mondélice à Remire-Montjoly en GuyaneAncienne habitation sucrière Vidal ou Mondélice à Remire-Montjoly en Guyane

Sources :

Archives Nationales d'Outre-Mer (ANOM)

Bulletins Officiels de la GF

Ministère de la culture (Bases de données)

Partager cet article

Repost0

commentaires

Créer un blog gratuit sur overblog.com - Contact - CGU -